Vicky Krieps, insaisissable luxembourgeoise : « Je ne me sens jamais obligée de rien »

Mis à jour le 30 août 2024 par Sophie Massendari
Vicky Krieps, insaisissable luxembourgeoise : « Je ne me sens jamais obligée de rien »© Stephen Mattues

Depuis sa révélation internationale en 2017 dans Phantom Thread, Vicky Krieps a conquis Hollywood et le cinéma européen, incarnant avec grâce des héroïnes en recherche d’affranchissement. Rencontre avec une actrice à fleur de peau, insaisissable et sans compromis, qui refuse de se laisser enfermer dans des cases.

En 2017, le grand public la découvre, surgissant des cuisines d’une auberge de campagne, en serveuse chancelante aux joues rosissantes, mais debout face au monstre du cinéma Daniel Day-Lewis (Phantom Thread de Paul Thomas Anderson). Un trouble non feint par la comédienne hyper-émotive, dont la performance dans le rôle d’Alma, jeune muse prise dans un corps-à-corps complexe avec un couturier pygmalion, est unanimement saluée par la critique. À 35 ans, la comédienne aux nuances infinies et pouvant jouer dans trois langues, accède à la renommée internationale. En 2022, lors de la 35e cérémonie des prix du cinéma européen elle est sacrée meilleure actrice européenne pour son incarnation de l’impératrice Elisabeth d’Autriche (Sissi) dans Corsage, réalisé par Marie Krutzer.

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Nous rencontrons la plus célèbre des comédiennes luxembourgeoises en pleine promotion de son dernier film, The dead don’t hurt (Jusqu’au bout du monde), un néo-western féministe sur fond de guerre de Sécession dans lequel elle interprète Vivienne Le Coudy, une jeune immigrée résolument indépendante, qui accepte de suivre Holger Olsen (Viggo Mortensen, également réalisateur du film) dans le Nevada. D’une élégance rare, sans aucun artifice autre qu’un simple foulard noué autour du cou, Vicky Krieps désarme par son naturel. Charme franc et œil rebelle, elle éblouit par l’exceptionnel équilibre entre sa sensibilité et sa remarquable indépendance d’esprit. Un double héritage de son grand-père paternel, résistant déporté dans les camps, abolitionniste de la peine de mort au Luxembourg, qui lui a appris le parler vrai et la résistance aux pressions, et de ses grands-mères, dont elle admirait la liberté, la fantaisie et la force de constamment s’évertuer à s’affranchir des codes. De sa filmographie panachée, du film d’auteur à la superproduction, une dialectique se dessine, qui cherche à éprouver la complexité de l’expérience humaine, particulièrement féminine. Ses rôles sont des mises en abyme de ses propres tourments intérieurs qui questionnent les frontières, les carcans, les projections qui enserrent, la recherche d’un équilibre entre les différents rôles d’une vie. Elle incarne ainsi à l’écran avec une fluidité inouïe des héroïnes en sourdine, en rejet des conventions d’une époque, qui vont vers une forme de libération intérieure.

JE PORTE MES FRAGILITÉS AVEC DIGNITÉ EN TOUTES CIRCONSTANCES

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Actrice sans frontière

Née en 1983 d’une mère allemande (fille d’un soldat de la Wehrmacht) et d’un père luxembourgeois (fils de résistant), dans un monde dans lequel l’empreinte de la guerre était encore visible, Vicky Krieps a très tôt questionné son essence et ses origines.

« Mon histoire familiale m’a appris à interroger et à nuancer, à ne pas adhérer au noir et blanc, car sinon qu’est-ce que cela aurait voulu dire de moi ? » Elle grandit au Grand-Duché, immergée dans un mélange de cultures et de langues, dans un monde qu’elle pensait alors sans frontières. Elle se souvient d’une enfance un peu irréelle dans un « chaos coloré et sonore », une maison d’artistes bruyante et grande ouverte, près d’un château en ruine à Hesperange, proche de la nature, qui faisait la joie des enfants du quartier. Elle découvre le cinéma très jeune. Son père travaille dans l’exploitation cinématographique mais c’est surtout à la cinémathèque de Luxembourg qu’elle vit ses premières épiphanies artistiques, notamment avec La belle et la bête de Jean Cocteau. L’art de réaliser des films la fascine mais c’est véritablement avec Breaking the waves de Lars von Trier qu’elle regarde pour la première fois l’actrice, l’envisage avec toute l’intensité et ce qu’il peut y avoir d’aventureux dans le jeu. Elle fait ses premiers pas au théâtre de son lycée (le Lycée de Garçons à Limpertsberg) puis au conservatoire de Luxembourg, où malgré ses tentatives pour se cacher derrière ses personnages, son indéniable talent est vite remarqué.

Mais la liberté et l’ouverture éducative au sein de sa famille, qu’elle qualifie d’« hippie », tranchent avec la rigidité du système scolaire, dans lequel elle ne se sent jamais à sa place. Allergique à la hiérarchie et à l’ordre établi, elle se souvient avoir viscéralement souffert de « ne pas avoir le droit de dire non, d’être privée de la possibilité de pousser les apprentissages pour des échanges et des réflexions plus profonds et complexes. Je refuse d’écrire des choses déjà écrites ! ». Lors de son discours de remise du diplôme du baccalauréat, elle exprime alors son ressentiment, affirmant être la « preuve même qu’il suffit pour réussir d’apprendre par cœur, copier sur les autres et fermer sa gueule ! », causant un véritable scandale national. Le besoin de fuir son petit pays et découvrir le monde la conduit alors à s’exiler quelques mois en Afrique du Sud pour une mission humanitaire. À son retour, sa professeure du conservatoire, Michèle Clees, qui lui avait insufflé le désir de se tourner vers une carrière d’actrice, l’encourage à poursuivre avec des études de théâtre. « L’approche de Michèle Clees était assez révolutionnaire, elle a donné envie à de nombreux élèves de faire ce métier et a eu une grande influence sur mes aspirations artistiques ». La jeune Vicky passe alors des concours et choisit de s’inscrire à l’Université des Arts de Zurich.

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S’affranchir et exister

Partir pour se trouver, quitter le monde, souvent jusqu’à l’inéluctable, est l’un des thèmes forts qui cimentent son répertoire. La comédienne avoue avoir eu elle-même le fantasme, comme tant de femmes, de tout quitter. Dans Serre Moi Fort de Matthieu Amalric pour lequel elle reçoit une nomination aux Césars dans la catégorie « meilleure actrice », elle campe une femme qui laisse derrière elle mari et enfants. Disparition et émancipation sont également au cœur de Plus Que Jamais (dernier film de Gaspard Ulliel), dans lequel elle incarne avec brio Hélène, une femme qui, souffrant d’une maladie auto-immune inguérissable et ne supportant plus d’être mourante au milieu des vivants, décide de partir voyager seule en Norvège. La comédienne trouve dans le cinéma le moyen d’explorer et questionner à l’envi l’expérience humaine, de manière presque scientifique. « Chaque personne porte en elle ses propres frontières, intérieures et extérieures, particulièrement les femmes. Je cherche à pousser à l’extrême ces frontières et l’expérience d’une vie, souvent jusqu’à la tragédie, ce qu’évidemment je ne pourrais jamais faire dans la vraie vie. Jouer est aussi une façon de vivre mille vies ! » Ses seules limites ? « Je ne pourrai jamais jouer une nazie par exemple. J’ai déjà joué le rôle d’une traductrice nazie ou d’un agent de contrôle à la frontière, mais compte tenu de mon histoire, je ne pourrai jamais aller au-delà. »

JE CHERCHE À POUSSER À L’EXTRÊME L’EXPÉRIENCE D’UNE VIE, SOUVENT JUSQU'À LA TRAGÉDIE, CE QU’ÉVIDEMMENT JE NE POURRAIS JAMAIS FAIRE DANS LA VRAIE VIE

Mue par un besoin irrépressible d’affranchissement, sa nature profonde l’invite à s’émanciper des carcans et à ne jamais se laisser enfermer dans des rôles. Vicky Krieps revendique un droit à la neutralité vis-à-vis de soi, pour être libre d’écrire qui l’on est, « un être humain avant tout. » « Ma plus grande liberté, c’est de ne jamais me justifier, m’expliquer ni même me définir, garder la possibilité d’être tout à la fois. Ma liberté, c’est de ne pas me demander si je suis assez belle, quel type de femme ou mère je suis, si je corresponds aux attentes de la société, mais plutôt d’explorer ce qu’il se passe si je me départis de tout ça et me permets juste d’exister. »

La comédienne à rebours avoue ainsi « ne pas chercher à séduire ni à être désirée », tenant à exister sans dépendre du regard de l’autre, pour éviter tout risque de se laisser distraire ou de s’y perdre. « Je ne cherche pas à plaire et ne suis pas non plus sensible aux flatteries. Cela peut être très déstabilisant pour les personnes avec qui je travaille, particulièrement pour les hommes, qui doivent trouver d’autres manières d’interagir avec moi ». Un moyen aussi pour elle de passer inaperçue. « Je ne joue pas à l’actrice, je n’arrive jamais dans une pièce avec l’énergie que l’on attend d’une actrice. Cela me permet de passer sous les radars et aussi inconsciemment de me protéger. » Elle s’amuse d’ailleurs de n’être pas « reconnue » dans sa vie quotidienne.Vicky Krieps est emblématique du paradoxe de l’acteur qui veut être vu sans être reconnu, qui cherche à servir au mieux le dessein de ses personnages tout en s’invisibilisant lui-même.

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La discrète comédienne a ainsi vécu difficilement sa soudaine renommée internationale après Phantom Thread, tant lui était insupportables l’exposition, les projections des critiques («c’est la prochaine X ou Y ! ») et le sentiment que l’on s’appropriait son travail pour le catégoriser. « Je ne veux pas être ‘juste une actrice’, d’ailleurs cela ne veut rien dire en soi. » Ce refus de la pression et des dogmes est pour elle un art de vivre. Sa trajectoire est ainsi particulièrement atypique. À 27 ans, elle tombe enceinte, alors qu’elle est en situation précaire sur le plan émotionnel et financier. S’ensuit une longue période d’errance dans laquelle elle se sent constamment renvoyée à son rôle de mère, empêchée de pouvoir accepter des tournages à l’étranger pour rester auprès de sa fille. Elle obtient des seconds rôles dans des petits films d’auteurs mais se désespère du sentiment d’impuissante attente et se souvient de longues soirées solitaires noyées dans les larmes. Elle a pour autant continué à suivre son intuition, sans jamais planifier sa carrière, choisissant spontanément des rôles en résonance avec ce qui l’anime.

JOUER EST AUSSI UNE FAÇON DE VIVRE MILLE VIES !

C’est finalement exactement ainsi qu’elle a été découverte par Paul Thomas Andersen. Cherchant l’actrice pour incarner la muse d’un grand couturier, il la repère par hasard sur l’affiche d’un film d’auteur allemand, Les Secrets de Lynn, et lui demande de passer des essais. Ce rôle a changé la donne, révélant au grand public et aux critiques l’étendue de son talent et des nuances de son jeu. Mais si le tsunami de cette soudaine renommée a pu la faire vaciller, sa sincérité est restée intacte, de pair avec son admirable capacité à dire non. « Je ne me sens jamais obligée de rien ! » L’actrice n’a ainsi pas hésité par la suite à décliner de nombreuses propositions hollywoodiennes qu’elle trouvait creuses ou sans intérêt, préférant des rôles taillés sur-mesure avec des cinéastes français dont elle affectionne particulièrement le travail.

MA FAÇON DE LE VIVRE, C’EST DE PORTER MES FAIBLESSES AVEC DIGNITÉ EN TOUTES CIRCONSTANCES

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Sans compromis

Sans code ni compromis, Vicky Krieps ne triche pas. On la décrit souvent rebelle et indomptable, mais cela tient à sa façon singulière d’être au monde, qui repose sur la reconnaissance pleine et entière de sa vulnérabilité et du sentiment d’imposteur qui ne l’a jamais véritablement quittée. « J’ai réalisé que ma fragilité et ma vulnérabilité feraient toujours partie de moi, que je serais toujours confrontée à des personnes ayant plus de pouvoir ou de privilèges. Ma façon de le vivre, c’est de porter mes faiblesses avec dignité en toutes circonstances ».

C’est d’ailleurs de cette manière qu’elle affirme avoir trouvé sa place auprès des grands noms du cinéma avec qui elle a travaillé. Lorsqu’elle évoque le tournage de Phantom Thread, avec le triplement oscarisé Daniel Day-Lewis, réputé pour son perfectionnisme et pour dévorer ses personnages, elle raconte avoir été tout d’abord profondément déstabilisée, notamment par la hiérarchie qui régnait sur le plateau. La méthode Vicky Krieps pour résister à la pression ? « La méthode 180. Je fais l’inverse de ce que l’on aurait tendance à faire naturellement. Au lieu de me préparer, de répéter mon texte, je me recentre sur moi-même, sur ce que je suis plutôt que sur ce que je sais. Je fais fi du statut de l’acteur en face de moi. Plutôt que de m’évertuer à changer les circonstances extérieures, je m’assois dans toute ma vulnérabilité. C’est mon luxe et ma fierté, être en accord avec toutes les parties de moi-même, surtout les parts d’ombre que l’on a tendance à vouloir cacher. C’est aussi cette approche qui me permet d’accepter l’autre tel qu’il est. »

Aujourd’hui mère de deux enfants (une fille de 13 ans et un garçon de 9 ans), l’artiste n’échappe pas au défi d’équilibriste que connaissent de nombreuses femmes, qui consiste à jongler entre les différents rôles d’une vie. Ce sont ces questionnements autour de « Quelle est ma juste place ? », qu’elle a souhaité explorer dans Bergman Island de Mia Hansen-Løve sorti en 2021, dans lequel elle incarne une scénariste en recherche d’équilibre entre son art et sa vie de famille, faisant voyager ses enfants à ses côtés dès qu’elle le peut. « Je ne sais pas quelle mère je suis, certainement pas une mère parfaite mais je fais de mon mieux. Je crois que nous sommes la première génération de femmes à avoir le droit d’être plusieurs genres de mères à la fois. J’essaie juste d’être honnête avec mes enfants ». Hors des plateaux de tournage, Vicky Krieps aspire à un quotidien le plus commun possible, une vie de famille ritualisée et simple, allant chercher son fils tous les jours à l’école, s’octroyant des moments d’évasion dans la nature.

Son ancrage

Lorsqu’on lui demande ce que le métier d’actrice lui a appris de plus précieux, elle répond sans hésiter : « Être dans le présent. Si on est présent là et maintenant, on est toujours honnête parce qu’on ne se demande pas qui on était ou ce que l’on pourrait être. ». À tout juste 40 ans, Vicky Krieps refuse ainsi de se laisser envahir par la peur de vieillir ou la crainte de l’invisibilisation des femmes plus âgées dans l’industrie du cinéma. Elle reste alignée dans sa bataille silencieuse contre les injonctions. « J’ai envie de me révolter contre la peur qui semble nécessaire à l’idée de vieillir, je n’ai pas envie de perdre mon temps à me battre contre ce que je ne contrôle pas, à avoir peur de vieillir alors que je suis vivante ! ». Une mise en abyme saisissante de son incarnation d’Elisabeth d’Autriche dans Corsage, qui suit l’iconique impératrice Sissi l’année de son 40ème anniversaire. Un conte intime sur l’émancipation de l’impératrice rebelle, qui après s’être évertuée des années durant à retenir le temps, suffoquant de l’étreinte de son corset, se retire du monde pour une oasis sororale de liberté. Cette révolte en sourdine est à l’image du féminisme personnel et singulier incarné par l’actrice, qui cherche simplement à suivre sa vie selon ses envies et son instinct, et non les diktats de la société. Elle fait entendre sa voix, un peu à la marge. « Mon féminisme est individuel, je m’aligne évidemment avec toutes celles et ceux qui se battent pour les droits des femmes. Mais le féminisme devrait être un non sujet, j’invoque aussi ici une forme de neutralité. Tous mes rôles sont féministes mais sans cris, j’incarne des combats plus muets et subtils. ». L’actrice a d’ailleurs dédié sa récompense de « Meilleure actrice européenne » pour son rôle de Sissi à « toutes les femmes dans le monde, qui ont besoin d’être vues et reconnues, qui ont besoin de guérir leurs blessures, qu’elles portent depuis des générations, pour que les femmes et les hommes puissent se retrouver. »

JE N’AI PAS ENVIE DE PERDRE MON TEMPS À ME BATTRE CONTRE CE QUE JE NE CONTRÔLE PAS, À AVOIR PEUR DE VIEILLIR ALORS QUE JE SUIS VIVANTE !

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Égérie

L’actrice au profil altier et délicat, égérie de plusieurs grandes marques, aborde avec la même cohérence la mode, qu’elle conçoit comme « l’expression extérieure d’une liberté intérieure. » Son rapport au style lui vient de ses grands-mères, dont elle se souvient qu’elles travaillaient leur allure de manière très libre. « Ma grand-mère paternelle pouvait assortir un pantalon C&A avec une veste Hermès et avait une allure folle dans la Grand-Rue. À son époque, c’était très avant-gardiste de faire ce type de mélanges si on voulait être une grande dame ! J’ai la même envie de jouer avec la mode, c’est pour moi un outil. Je ne le vois pas comme une contrainte mais plutôt comme une armure ou un déguisement, qui me permet de m’amuser et de m’exprimer. La mode doit rester quelque chose de libre et joyeux, si cela devient une doctrine trop sérieuse, cela ne m’intéresse plus. »

Elle apprécie particulièrement sa collaboration avec Chanel, de par l’histoire de sa créatrice qui l’inspire, mais aussi
parce qu’elle y voit d’abord un art, une mode avant d’être un vestiaire. « Les vêtements sont vivants. En essayant un vêtement Chanel, je pense toujours aux mains qui l’ont fabriqué. Je médite là-dessus, au processus de création de la conception à la production et au plaisir que me procure de porter cette chose vivante. J’en reviens toujours à mes grand-mères qui m’ont transmis cette joie et cette fantaisie ». L’actrice sans frontière par excellence, qui promène sa délicatesse et sa fraîcheur dans le cinéma d’auteur français et international, se sent aujourd’hui à sa place chez elle, à Berlin. Elle avoue ressentir le besoin de se recentrer sur l’essentiel, l’amour, ses enfants, son partenaire, ses amis. « J’arrive à un moment de vie qui se réduit vers l’essentiel, un nombre plus restreint de personnes, mais des relations plus denses et plus riches. J’ai besoin de rester très privée lorsque je ne tourne pas, de me ressourcer avec des choses simples, au-près de ma famille et dans la nature. Je nourris mon âme de ces moments, qui font contrepoids à mes angoisses et questionnements existentiels. »

Un acte de confiance

L’insaisissable Vicky Krieps n’est ainsi jamais là où on l’attend puisqu’elle ne le sait pas elle-même. Elle reste la première étonnée de son incroyable parcours. « Venant d’un si petit pays, il n’y avait a priori aucune chance de me retrouver un jour sur grand écran ! » Mais elle continue de cultiver l’amour et la confiance, les clés de voûte de son parcours artistique. « Un film est toujours une lettre d’amour, car c’est de la confiance. Chaque film est un acte de confiance. Alors que dans le monde on nous apprend le contraire. »

À côté du grand écran, la comédienne nourrit de nombreux autres projets et rêves artistiques, le théâtre, la réalisation, la musique, croyant aux vases communicants entre les arts. Depuis plusieurs années, elle écrit notamment une chanson pour quitter chacun de ses personnages, s’accompagnant à la guitare. « J’écris des choses très libres. Je ne sais pas encore ce que je vais en faire ni quand. Je fais simplement les choses quand elles font soudainement sens. »

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ÉQUIPE DE PRODUCTION

DIRECTION ARTISTIQUE : IRIS ROMBOUTS • MAQUILLAGE : FLORENCE
TEERLINCK • COIFFURE ET MANUCURE : RUDI CREMERS • ASSISTANT PHOTO :
NISRAN AZOUAGHE • ASSISTANTE PRODUCTION : MAURINE WILMUS

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